Les ménestrels de France et d’Angleterre, les minnesingers d’Allemagne, les skalds de Norvège et d’Islande, les akins du Kazakhstan et du Kirghizstan, les aschugs du Caucase… Ils appartenaient tous aux nobles cercles des traditions musicales populaires médiévales. Parmi eux, il y avait les lyralistes d’Europe de l’est. Principalement d’Ukraine.

Il y a toujours des débats sur leurs origines et leurs histoires. Mais la tradition de la lyre viendrait du 8eme siècle, où les premières techniques musicales et vocales étaient développées et maîtrisées.

Cette tradition naissante de la lyre semblait fortement reliée à celle des kobzas. Durant les spectacles, les musiciens rayonnaient les plus hauts standards spirituels de l’époque. Mais ils partageaient un standard social très bas de vagabonds et de mendiants. Il était exceptionnel que le plus haut standard moral était associé aux plus pauvres et aux rejetés.

Parmi les peuples slaves, les structures sociales des vagabonds était particulièrement diverse. Ceci était composé de mendiants errants, des musiciens basés dans des villes, de gens aveugles ou fou. En Biélorussie et en Russie, c’était des personnes âgées poussées par la faim et la pauvreté. En Pologne des mendiants cavaliers se transformant en musiciens saisonniers. Les praticiens de la lyre formaient une classe très réduite, mais très avancée aux niveaux moral, spirituel et artistique.

Les joueurs de lyre formaient des fraternités dont la structure hiérarchique pyramidale reflétait des niveaux internes de discipline souvent plus strictes que les moines. Les vertus spirituelles traditionnelles leur étaient fondamentales. Le commerce n’était pas leur principale activité, mais plutôt le partage de standards religieux, moraux et éthiques.

Un code de comportements oral était strictement appliqué. En rejoignant la fraternité, il fallait s’engager à respecter les règles – dont le respect, l’honneur et la confiance. Garder le secret n’était pas nécessaire seulement pour protéger les frères, mais aussi pour préserver les énergies astrales et les auras de chaque membre de la fraternité. Dans la même logique, un langage secret, l’arget, était développé et appliqué.

Le cœur de leur répertoire de la lyre était composé de chansons, textes religieux et ballades. Il y avait également des chansons morales, des fictions, des satires, des danses.

Le son très particulier de l’instrument, à la fois discontinue et doux, et aussi strident, monotone et fort pouvait varier suivant les interprétations du même thème musical. Le chant était silence, cri et clameur, émotionnellement chargé. Les joueurs de lyre étaient peu intéressés par la politique, mais plus par la religion. Leur vies simples et pieuses et leurs chants étaient vus comme une continuation d’une conversation avec dieu en dehors du sanctuaire.

En raison de la nature de ces confréries et des valeurs de ses membres, cette tradition de la lyre résista à la modernité et survécu sans aucun changement jusqu’au 20ème siècle. Elle se dégrada ensuite, mais perdura dans une relative isolation. Elle est jouée encore de nos jours. Mais des siècles de traditions furent réduites à du spectacle commercial. Ceux réussissant à conserver intacte la tradition et l’esprit peuvent la transmettre en secret.