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La juste mesure commence par ceci : se laisser toucher, mais pas affecter. Car étant incarné dans la matière, elle reste notre terrain d’expérience, elle a donc une grande utilité pour notre évolution spirituelle. N’étant pas des êtres matériels voulant avoir une expérience spirituelle, mais plutôt des êtres spirituels ayant à subir une expérience matérielle…

L’intensité de l’expérience matérielle se doit d’être assez forte pour affecter la psyché et atteindre l’âme, donc nous emmener à changer intérieurement. Poussés à nos limites lors des moments de crises, nous serons obligés de nous métamorphoser.

Mais si cette intensité est trop forte, sans dimension qui lui est supérieure, la matière nous submerge et nous enfonce encore plus dans le spectacle des illusions terrestres. La dimension initiatique est alors manquée : les êtres sont attachés au plaisir ou bloqués par la souffrance ou la peur. L’être est totalement emprisonné par la matière et ses illusions, au lieu d’en être libéré.

Maintenir cet équilibre entre implication et libération, entre investissement et détachement est très difficile. Car cela signifie remettre en question notre rapport à la matière, pour y trouver une nouvelle justesse. Ce rapport est très important, car il détermine la pertinence de notre incarnation, et l’équilibre entre l’intangible et le tangible.

Ce juste rapport avec la matière est le suivant : s’y impliquer tout en s’en libérant. Quand l’homme renonce à ses rapports empiriques aux choses et aux êtres, quand il prend du recul sur sa réalité objective : alors seulement il peut discerner Dieu comme étant une source de ses expériences. Il peut également discerner son intériorité comme étant la source de ses expériences extérieures. Il se pose alors dans sa conscience spirituelle.

Si les moments de plaisir ne lui ont pas permis ce changement de rapport à sa réalité et à lui-même, la souffrance pourra le forcer à effectuer ce pas. Ce recul qu’il accomplit le met en distance vis-à-vis du monde matériel, mais en même temps le rapproche du monde spirituel. L’homme peut sentir la grâce divine quand il reconnait les lois créatives à l’œuvre et peut alors coopérer avec elles.

Une fois que l’homme s’est éveillé à sa nature spirituelle, il s’oriente vers le divin et n’est plus complètement soumis aux lois de la nature. Cette réalité divine étant éternelle, il peut renoncer dans son corps, son cœur et son mental aux instabilités du monde temporel, et se connecter à la stabilité des lois divines. Ces lois éternelles étant toujours parfaites dans leurs manifestations, l’homme ne peut que les accepter et les traverser en conscience. Tenu en équilibre par les reflets de la vérité dans la matière, la conscience humaine ne peut que rester dans la présence divine, même au milieu de l’erreur et du chaos.

Si l’homme reste obéissant à la guidance divine, il ne sera jamais submergé par les conditions négatives de sa vie. Les évènements, positifs comme négatifs, deviennent dans ce cas des moyens de perfectionner sa nature. Le juste rapport au monde est donc à l’équilibre entre implication et détachement, entre le céleste et le terrestre.