« Un voyage se passe de motifs. Il ne tarde pas à prouver qu’il se suffit à lui même. On croit qu’on va faire un voyage mais bientôt c’est le voyage qui vous fait ou vous défait. »

« Mais c’est le propre des longs voyages que d’en ramener tout autre chose que ce que l’on allait y chercher. »

« En route, le mieux c’est de se perdre. Lorsqu’on s’égare, les projets font place aux surprises et c’est alors, mais alors seulement que le voyage commence. »

« La vertu d’un voyage, c’est purger la vie avant de la garnir. »

Nicolas Bouvier

 

Visiter des nouveaux lieux, partir en voyage, faire du tourisme… C’est un moment des vacances très attendu, ça peut être une passion qui occupe toute une partie de la vie. Mais au delà des lieux visités, du nombre de pays arpentés, des gens nouveaux rencontrés, des expériences et des souvenirs ramenés… c’est un rapport à l’altérité, une relation à la réalité qui se révèle.

Voyager ou faire du tourisme : deux états de conscience différents révélant deux rapports au monde opposés.

Le tourisme renvoie à la consommation. Le tourisme de masse est apparu avec la démocratisation des moyens de transport et la civilisation industrielle. Le voyage a toujours existé, il inclut les explorations, les déplacements de découvertes.

Le touriste voyage pour consommer : consommer des paysages, des gens, des cultures, des moments privilégiés. Mais si on consomme, on est à son tour consommé. Le touriste est perçu comme un portefeuille ambulant, pouvant rapporter de l’argent et alimenter des économies entières. La seule valeur est pécuniaire, le seul critère est quantitatif : des souvenirs contre de l’argent.

Le voyageur voyage pour vivre : il ne consomme pas mais découvre, se découvre à travers de nouvelles cultures et de nouvelles rencontres. Il n’est pas là pour consommer mais pour apprendre ou être surpris. La valeur la plus importante est la découverte et la rencontre, le critère principal est qualitatif : la surprise, l’enrichissement.

Le tourisme emprunte les autoroutes de l’industrie des voyages. Il reste dans les chemins les plus empruntés et suit les traces culturelles et mercantiles déjà créés pour lui. Il suit les guides touristiques.

Le voyage arpente les routes secondaires, quoique parfois il peut également suivre les chemins touristiques. Mais il reste dans sa philosophie de découvertes. Il créé lui même ses propres chemins, ou se laisse surprendre et improvise son voyage au fil des rencontres et des opportunités, suspend ou modifie son périple suivant son instinct et son intuition. Il peut alors sillonner des routes inédites.

Le touriste peut visiter des centaines de pays et rester exactement la même personne. Il aura transporté avec lui sa bulle de certitudes et de protection, et n’aura pas été transformé.

La voyageur peut visiter un lieu, n’importe quel lieu près de chez lui ou à l’autre bout de la terre, et se trouver transformé, enrichi. Il aura approché l’altérité de manière ouverte, de manière à provoquer une véritable rencontre.

Le touriste reste dans un déplacement contrôlé, délimité par les barrière du mercantilisme et de la consommation. Son voyage est pré-déterminé et anticipé. Ses rencontres restent limitées à des relations marchandes ou à d’autres touristes comme lui.

Le voyageur se laisse surprendre. Il arpente et s’égare, il se perd pour mieux trouver une nouvelle par de lui même. Il se laisse surprendre par la vie, se permet une remise en question de lui même à travers les personnes et les cultures croisées.

Le tourisme est une excroissance de la logique de consommation de l’ère industrielle. Le voyage a toujours existé, il fait partie de l’expérience humaine.